Les historiens se sont emparés de la bande dessinée comme d'un support non seulement pour l'enseignement (à l'exemple de l'histoire de la Shoah : "À titre indicatif, la guerre, la déportation et l’extermination dans les camps nazis ont été racontées pour la première fois dans une bande dessinée d’Edmond-François Calvo, Victor Dancette et Jacques Zimmermann,
La bête est morte ! en 1947 (réédition Futuropolis, 1977). Aux États-Unis, la première évocation de chambres à gaz apparait dans une bande de Bernard Krigstein et Al Ferstein intitulée
Master race (La grande course) parue en 1955 dans le premier numéro de la Revue
Impact chez Entertaining Comics. Art Spiegelman reprit l’idée du bestiaire à Calvo (qui eut lui même des problèmes avec Walt Disney qui s'imaginait être pillé) pour créer
Maus: A Survivor's Tale en deux volumes (1986 et 1991). Tout en restituant l’histoire d’Auschwitz, le script fait la part belle aux difficultés relationnelles qu’éprouve l'auteur face à son père, survivant d’Auschwitz. Il fallut ensuite attendre Pascal Croci qui, dans
Auschwitz (éd. Emmanuel Proust, 2002), représenta pour la première fois une chambre à gaz en activité. Les publications autour des camps se multiplient alors que dans le même temps de nombreuses thématiques liées à l'occupation et à la déportation s’enchaînent avec, par exemple, Tout le monde aime
le printemps de Guy Vidal et Alain Bignon, (Dargaud, 1987),
L'innocente de Warnauts et Raives (Casterman, 1994), Les albums d'Yslaire du cycle
Mémoires du XXe Ciel (Delcourt, 1997 et 1999, Les Humanoïdes associés, 2001 et 2004),
La 27e Lettre de Will et Desberg (Dupuis, 2003),
Senne et Sanne: Rebecca R. de Marc Verhaegen (Mezzanine, Gent, 2005), De Zoektocht, (
La Quête), de Eric Heuvel, R. Van der Rol et L. Schippers (Fondation Anne Frank en coll. avec le Musée d'Histoire Juive de Hollande, Uitgeverij L., Amsterdam, 2007), pour n'en citer que quelques-uns. Notons également les premiers albums portant sur la Première Guerre mondiale (Tardi,
C'était la guerre des tranchées, Casterman, 1993) et sur les génocides des Arméniens (Guy Vidal et Florenci Clavé,
L’île aux Chiens, Dargaud, 1979 et Sang d’Arménie, Dargaud, 1985), Tsiganes (Kkrist Mirror,
Tsiganes 1940-1945. Le camp de concentration de Montreuil-Bellay, EEP, 2008), Cambodgien (Sera,
Impasse et rouge, Rackham, 1995 ;
L’eau et la terre, Cambodge 1975-1979, Delcourt, 2005 ;
Lendemains de cendres, Cambodge 1979-1993, Delcourt, 2007), Rwandais (Jean-Philippe Stassen, Deogratias, Dupuis, 2000) et Pawa, Delcourt, 2002), et les camps soviétiques (René Sterne,
Le Goulag, Lombard, 2003)" Extraits de l'appel à communication de la Fondation Auschwitz pour un numéro de revue sur "La bande dessinée à l'épreuve des génocides" ==> http://calenda.revues.org/nouvelle14919.html).
Mais la bande dessinée (tant la franco-belge que les comics nord-américains ou les bandes dessinées asiatiques telles que le manga japonais, le manhua chinois ou le manhwa coréen) donne également à voir de l'espace : comme le cinéma(http://www.cafe-geo.net/rubrique.php3?id_rubrique=48), les bandes dessinées nous donnent à voir le monde à travers des filtres de représentations. Quels espaces de vie, quels espaces fantasmés vous semblent pertinents dans vos lectures récréatives pour une analyse géographique ?
Quelques liens :
- le blog "Samarra", réalisé par un groupe de professeurs du secondaire, qui propose des analyses historiques et géographiques de diverses musiques et bandes dessinées : http://mondomix.com/blogs/samarra.php (les pages sur les BD de toutes formes : http://mondomix.com/blogs/samarra.php/BDManga/)
- un edito des Cafés géo sur la question du manga : "Le manga, ça sert aussi à faire de la géographie ?" (http://www.cafe-geo.net/article.php3?id_article=1760)
- à suivre, les travaux d'un doctorant en géographie, Julien Champigny, sur "L'espace dans la bande dessinée".