La Serbie fait un pas de plus vers l'Europe
Claire Gallen - Bruxelles - Le Figaro
Mardi à Stockholm, le président Boris Tadic,a remis la candidature serbe au premier ministre suédois, Fredrik Reinfeldt, qui assure la présidence tournante de l'UE.
Le président serbe Boris Tadic a déposé mardi la demande d'adhésion de son pays à l'UE.
La Serbie voit son avenir au sein de l'Europe. Dix ans après la fin de la guerre qui l'avait mise au ban de la communauté internationale, Belgrade a formellement déposé mardi une demande d'adhésion à l'UE. Mais le processus d'adhésion risque de prendre plusieurs années.
«Cela fait dix ans que la guerre a pris fin, dix ans que notre isolement a pris fin. Au cours de ces dix années, notre but principal a été de faire entrer la Serbie dans l'Union européenne», a affirmé le président serbe Boris Tadic à Stockholm où il était venu déposer officiellement la candidature de son pays auprès de la présidence tournante de l'UE.
Mladic toujours en liberté
Le ministre des Affaires étrangères, Vuk Jeremic, a récemment dit espérer que la Serbie puisse entrer dans l'UE à d'ici 2014. Il s'agit là d'une hypothèse optimiste, les analystes tablant plutôt sur 2016, voire 2018, pour boucler le processus. «La route vers l'adhésion est longue et difficile», a averti mardi le premier ministre suédois, Fredrik Reinfeldt. Avec, en toile de fond, les interrogations sur l'arrestation de Ratko Mladic et le statut du Kosovo.
Le sort de l'ancien chef militaire des Serbes de Bosnie est sans doute le point le plus délicat. Inculpé par la justice internationale pour génocide pendant la guerre de Bosnie de 1992 à 1995, Ratko Mladic est en cavale depuis des années, à la grande irritation des Vingt-Sept. Les Pays-Bas ont été les plus intransigeants, bloquant jusqu'au début du mois la mise en place d'un traité de libre-échange entre l'UE et la Serbie. Mais Belgrade doit sur ce point composer avec une opinion publique encore indulgente sur le rôle de l'ancien chef militaire.
L'autre sujet de frictions vient du Kosovo, qui a proclamé son indépendance en février 2008, mais que la Serbie considère toujours comme l'une de ses provinces. À l'instar des États-Unis, 22 des 27 pays de l'UE ont reconnu cette indépendance.
Au delà, la Serbie aura encore beaucoup à faire pour rejoindre l'UE, qu'il s'agisse d'éradiquer la corruption, de moderniser son économie ou encore de réformer sa justice. «Il faudrait surtout qu'il y ait une nette séparation entre le politique, le judiciaire et l'économique», note le géographe et diplomate Michel Foucher, membre de la Fondation Robert-Schuman, car «la période passée a favorisé la confusion des genres».
Consciente du virage proeuropéen engagé sous la houlette du président Boris Tadic, l'UE a voulu donner des gages à la Serbie en multipliant les gestes de bonne volonté, telle la levée des visas au début du mois, qui a permis aux détenteurs de passeports biométriques d'entrer librement dans l'Union. Certaines chancelleries auraient sans doute préféré que Belgrade attende un peu avant de demander son entrée dans l'UE ; elle a préféré enfoncer le clou et entamer directement la seconde étape. Pour les observateurs, c'est un choix politique clair en faveur de l'Europe.